vendredi 12 septembre 2008

LES TSIGANES VU PAR UN ECRIVAIN

Pour changer un peu de ce que l'on a l'habitude d'entendre sur les Tsiganes, je vous laisse lire un extrait de l'hommage de Andrej Stasuik sur ce peuple. Il est romancier et essayiste en Pologne et est publié en France.

"Voilà que d'un continent lointain surgit un peuple privé d'histoire, de son histoire. A la place, il dispose de contes de fées et de légendes transmises oralement. Ce peuple se déplace à travers notre civilisation et notre culture, une civilisation et une culture qui nous emplissent à juste titre de fierté. Et, en même temps, il ne manifeste aucun intérêt particulier pour cette culture, pour cette civilisation. Tout au plus en choisit-il quelques bribes- des déchets, des détritus, des restes. Ce peuple beau à la peau brune se tient en marge et a l'audace de ne pas aspirer à autre chose. Il observe le monde qui l'entoure d'un oeil méfiant et semble nous ignorer, nous, le peuple blanc qui donne le la. Comme si nous n'avions rien de spécial à offrir. Dans le meilleur cas, on peut toujours voler les choses les plus indispensables, les trouver dans une poubelle ou mendier. Sincèrement, je dois avouer que ce radicalisme tsigane me subjugue.

De tous les Européens, ce sont les Tsiganes qu'on aime le moins. Le Tsigane est l'étranger par excellence. Il est parmi nous depuis sept cent ans, il s'exprime dans nos langues quand il le faut, il a nos religions, mais, spontanément et naturellement, qui le définirait comme un Européen?
D'une certaine manière, tous les "nouveaux" européens sont des tsiganes. On les accepte au sein de la communauté à condition qu'ils changent, qu'ils se curent les ongles et qu'ils apprennent les bonnes manières. C'est comme ça, et ni les sourires hypocrites ni les fausses promesses ni changeront rien.

Oui. Sans les Tsiganes, nous ne serions plus rien. Nous devrions prendre soin d'eux, sauvegarder leur culture, les persuader de conserver le plus longtemps possible leurs coutumes tsiganes. Nous devrions même financer tout cela. Cela ne sert à rien de les obliger à être comme nous. Le vrai défi européen consiste à faire survivre les Tsiganes sous la forme qu'eux même voudront choisir. C'est la que nous ferions la preuve de notre européanité.
Pour nous, les Tsiganes doivent tout simplement devenir ce que nous sommes: des Polonais, des Slovaques, des Luxembourgeois. C'est la condition que nous leur posons. Ils peuvent garder leurs perles, leurs vêtements bariolés, les chants et les danses avec lesquelles ils nous divertissent.

Nous devrions veiller à ce que le mépris qu'ils nous témoignent, à nous les gadjé à la peau claire, ne s'éteigne jamais, parce que ce mépris est l'un des fondements de leur culture, qui constitue -personne ne le niera- un élément pittoresque et indispensable de la culture européenne depuis au moins sept cent ans."
Andrej Stasuik

1 commentaire:

Anonyme a dit…

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Biz
Emilia